jeudi 22 janvier 2015

Vauvenargues - Maximes et réflexions


Vauvenargues - Maximes et réflexions

67. Il est difficile d’estimer quelqu’un comme il veut l’être
103. Les méchants sont toujours surpris de trouver de l’habileté dans les bons
106. Nous découvrons en nous-mêmes ce que les autres nous cachent, et nous reconnaissons dans les autres ce que nous nous cachons à nous-mêmes
114. On ne s’amuse pas longtemps de l’esprit d’autrui.
143. La pensée de la mort nous trompe, car elle nous fait oublier de vivre
145. La plus fausse de toutes les philosophies est celle qui, sous prétexte d’affranchir les hommes des embarras des passions, leur conseille l’oisiveté, l’abandon et l’oubli d’eux-mêmes
160. Le prétexte ordinaire de ceux qui font le malheur des autres, est qu’ils veulent leur bien.
191. Il est bon d’être ferme par tempérament, et flexible par réflexion.
192. Les faibles veulent quelquefois qu’on les croie méchants ; mais les méchants veulent passer pour bons
203. Quand on a beaucoup de lumières, on admire peu ; lorsque l’on en manque, de même. L’admiration marque le terme de nos connaissances, et prouve moins, souvent, la perfection des choses, que l’imperfection de notre esprit
215. Savoir bien rapprocher les choses, voilà l’esprit juste ; le don de rapprocher beaucoup de choses et de grandes choses, fait les esprits vastes. Ainsi, la justesse paraît être le premier degré, et une condition très-nécessaire de la véritable étendue d’esprit.
219. Il y a peut-être autant de vérités parmi les hommes que d’erreurs, autant de bonnes qualités que de mauvaises, autant de plaisirs que de peines ; mais nous aimons à contrôler la nature humaine, pour essayer de nous élever au-dessus de notre espèce, et pour nous enrichir de la considération dont nous tâchons de la dépouiller. Nous sommes si présomptueux, que nous croyons pouvoir séparer notre intérêt personnel de celui de l’humanité, et médire du genre humain, sans nous compromettre. Cette vanité ridicule a rempli les livres des philosophes d’invectives contre la nature. L’homme est maintenant en disgrâce chez tous ceux qui pensent, et c’est à qui le chargera de plus de vices ; mais peut-être est-il sur le point de se relever, et de se faire restituer toutes ses vertus ; car rien n’est stable, et la philosophie a ses modes comme les habits, la musique, l’architecture, etc.
220. Sitôt qu’une opinion devient commune, il ne faut point d’autre raison pour engager les hommes à l’abandonner, et à embrasser l’opinion contraire, jusqu’à ce que celle-ci vieillisse à son tour, et qu’ils aient besoin de se distinguer par d’autres choses. Ainsi, s’ils atteignent le but dans quelque art ou dans quelque science, on doit s’attendre qu’ils le passeront bientôt pour acquérir une nouvelle gloire ; et c’est ce qui fait, en partie, que les plus beaux siècles dégénèrent si promptement, et qu’à peine sortis de la barbarie, ils s’y replongent.
243. Nous nous consolons rarement des grandes humiliations ; nous les oublions.
277. Un menteur est un homme qui ne sait pas tromper ; un flatteur, celui que ne trompe ordinairement que les sots : celui qui sait se servir avec adresse de la vérité, et qui en connaît l’éloquence, peut seul se piquer d’être habile
284. L’envie ne saurait se cacher : elle accuse et juge sans preuves ; elle grossit les défauts ; elle a des qualifications énormes pour les moindres fautes ; son langage est rempli de fiel, d’exagération et d’injure. Elle s’acharne avec opiniâtreté et avec fureur conte le mérite éclatant ; elle est aveugle, emportée, insensible, brutale.
310. Le commerce est l’école de la tromperie.
320. Comme il est naturel de croire beaucoup de choses sans démonstration, il ne l’est pas moins de douter de quelques autres, malgré leurs preuves.
329. L’art de plaire est l’art de tromper
330. Nous sommes trop inattentifs, ou trop occupés de nous-mêmes, pour nous approfondir les uns les autres : quiconque a vu des masques, dans un bal, danser amicalement ensemble, et se tenir par la main sans se connaître, pour se quitter le moment d’après, et ne plus se voir ni se regretter, peut se faire une idée du monde

Maximes Posthumes
386. Mes passions et mes pensées meurent, mais pour renaître ; je meurs moi-même sur un lit, toutes les nuits, mais pour reprendre de nouvelles forces et une nouvelle fraicheur. Cette expérience que j’ai de la mort, me rassure contre la décadence et la dissolution du corps : quand je vois que la force active de mon âme rappelle à la vie ses pensées éteintes, je comprends que celui qui a fait mon corps peut, à plus forte raison, lui rendre l’être. Je dis dans mon cœur étonné : Qu’as-tu fait des objets volages qui occupaient tantôt ta pensée ? retournez sur vos propres traces, objets fugitifs. Je parle, et mon âme s’éveille ; ces images mortelles m’entendent, et les figures des choses passées m’obéissent et m’apparaissent. O âme éternelle du monde, ainsi votre voix secourable revendiquera ses ouvrages, et la terre, saisie de crainte, restituera ses larcins !
423. Les bonnes maximes sont sujettes à devenir triviales.
424. Les hommes aiment les petites peintures, parce qu’elles les vengent des petits défauts dont la société est infectée ; ils aiment encore plus le ridicule qu’on jette avec art sur les qualités éminentes qui les blessent. Mais les honnêtes gens méprisent le peintre qui flatte si bassement la jalousie du peuple, ou la sienne propre, et qui fait métier d’avilir tout ce qu’il faudrait respecter
446. La solitude est à l’esprit ce que la diète est au corps, mortelle lorsqu’elle est trop longue, quoique nécessaire.
521. Tous les hommes naissent sincères, et meurent trompeurs.
522. Les hommes semblent être nés pour faire des dupes, et l’être d’eux-mêmes.
555. [On parle et l’on écrit rarement comme l’on pense.]
612. [Nous ne pensons pas si bien que nous agissons.]
617. [L’esprit n’est aujourd’hui à si bas prix, que parce qu’il y en a beaucoup.]
700. [Oh ! qu’il est difficile de se résoudre à mourir!]
Maximes supprimées
804. Un peu de bon sens ferait évanouir beaucoup d’esprit.
823. On n’est pas toujours si injuste envers ses ennemis qu’envers ses proches
824. La haine des faibles n’est pas si dangereuse que leur amitié
829. Au défaut des choses extraordinaires, nous aimons qu’on nous propose à croire celles qui en ont l’air.
844. L’esprit est borné jusque dans l’erreur, qu’on dit son domaine
845. L’intérêt d’une seule passion, souvent malheureuse, tient quelquefois toutes les autres en captivité ; et la raison porte ses chaines sans pouvoir les rompre
884. Nous n’avons pas assez d’amour-propre pour dédaigner le mépris d’autrui
896. Rien n’est plus facile aux hommes en place que de s’approprier le savoir d’autrui.
924. Nous nous persuadons quelquefois nos propres mensonges pour n’en avoir pas le démenti, et nous nous trompons nous-mêmes pour tromper les autres
943. Ceux qui méprisent l’homme se croient de grands hommes.

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