jeudi 22 janvier 2015

Auguste Blanqui - Maintenant, il faut des armes



Blanqui – Maintenant il faut des armes

Déclaration du Comité provisoire des Ecoles 22 janvier 1831
L’Université, façonnée par Napoléon en instrument de despotisme, si bien exploité par la Restauration, ne doit pas survivre à ces deux tyrannies. Nous sommes las de cet exécrable impôt qui frappe ce qu’il y a de plus saint et de plus sacré, ce qui fait l’homme et le citoyen : l’instruction.

Défense d’Auguste Blanqui au procès des Quinze 12 janvier 1832
Nous demandons que les trente millions de Français choisissent la forme de leur gouvernement et notamment, par le suffrage universel, les représentants qui auront mission de faire les lois. Cette réforme accomplie, les impôts qui dépouillent le pauvre au profit du riche seront promptement supprimés et remplacés par d’autres, établis qui des bases contraires. Au lieu de prendre aux prolétaires laborieux pour donner aux riches, l’impôt devra s’emparer du superflu des oisifs pour le répartir entre cette masse d’hommes indigents que le manque d’argent condamne à l’inaction ; frapper les consommateurs improductifs pour féconder les sources de la production ; faciliter de plus en plus la suppression du crédit public, cette plaie sanieuse du pays ; enfin, substituer au funeste tripotage de Bourse un système de banques nationales où les hommes actifs trouveront des éléments de fortune. Alors,  mais seulement alors, les impôts seront un bienfait.

93 est un épouvantail bon pour les portiers et les joueurs de domino.

Rapport à la Société des Amis du peuple 2 février 1832
En 1814 et 1815, la classe bourgeoise fatiguée de Napoléon, non pas à cause du despotisme – elle se soucie peu de la liberté qui ne vaut pas à ses yeux une livre de bonne cannelle ou un billet bien endossé – mais parce que, le sang du peuple épuisé, la guerre commençait à lui prendre ses enfants, et surtout parce qu’elle nuisait à sa tranquillité et empêchait le commerce d’aller, la classe bourgeoise, donc, reçut les soldats étrangers en libérateurs, et les Bourbons comme des envoyés de Dieu. Ce fut elle qui ouvrit les portes de Paris, qui traita de brigands de la Loire les soldats de Waterloo, qui encouragea les sanglantes réactions de 1815.

[Face à la persistance de l’agitation révolutionnaire et à l’aggravation de la crise, le 13 mars 1831, Louis-Philippe nomme président du Conseil le plus énergique des hommes du « parti de la résistance », Casimir Périer, dont le programme est de renforcer l’autorité gouvernementale en brisant les oppositions qui mettent en danger le régime. Son gouvernent n’hésite pas à engager l’épreuve de force avec les canuts lyonnais en novembre 1831 et réprime dans le sang l’insurrection parisienne des 5 et 6 juins 1832.
Dans le Libérateur, la lutte des classes est exprimée en termes de parcours historique bien avant le Manifeste de Marx, la propriété attaquée bien avant le célèbre texte de Proudhon, la description de la misère du peuple décrite avant la grande enquête officielle de Villermé. Les influences sont nombreuses, Rousseau bien sûr, Babeuf, ainsi que les socialistes de l’époque : Fourier, Considérant, Cabet, et surtout Lamennais qui Blanqui fréquente jusqu’à la prise d’armes de mai 1839. Blanqui reprend la parabole de Saint-Simon sur les oisifs et les travailleurs, mais se différencie des socialistes utopistes en se réclamant d’un système politique, la république, pour parvenir à la société nouvelle] Le Nuz

Notre drapeau, c’est l’égalité. Le Libérateur n°1 2 février 1834
En un mot, nous sommes toujours et partout avec les opprimés contre les oppresseurs, et nous disons comme Saint-Just : « les malheureux sont les puissants de la terre ».
C’est toujours le privilège avec son même drapeau où l’on lit : « oisiveté et exploitation », tandis que l’égalité lui oppose avec son moins de constance sa devise si souvent victorieuse : « intelligence et travail !».

La richesse sociale doit appartenir à ceux qui l’ont créée, le Libérateur n°2 février 1834
Si on examine quelles sont les sources de la richesse sociale, on trouve qu’elle réside exclusivement dans l’intelligence et le travail. C’est en effet par le travail et l’intelligence qui la société vit et respire, grandit et se développe, et si ces deux forces se retiraient d’elle un seul instant, elle tomberait aussitôt en dissolution et tous ses membres périraient comme par une soudaine catastrophe.
Mais ces deux forces ne peuvent agir qu’à la condition d’un troisième élément, inerte par lui-même, et qui sert d’instrument entre les mains des hommes d’intelligence et de travail pour entretenir la vie de la société. Cet élément, c’est le sol. Il semble donc que le sol doit appartenir également à tous les membres de la société qui, de tous leurs efforts combinés, exploiteraient la richesse qu’il recèle dans ses entrailles.

[Blanqui demande report des élections du 9 avril 1848. Lamartine refuse. Blanqui a compris que le manque d’éducation des classes populaires, leur inexpérience du suffrage universel risque de faire le jeu de la réaction dans cette France à majorité rurale, sous l’influence des notables]
[le résultat donne raison à Blanqui : les modérés remportent une victoire massive, la défaite des socialistes est complète] Le Nuz

Lettre à Maillard, Belle-Île 6 juin 1852
Proudhoniens et communistes sont également ridicules dans leurs diatribes réciproques, et ils ne comprennent pas l’utilité immense de la diversité dans les doctrines. Chaque nuance, chaque école a sa mission à remplir, sa partie à jouer dans le grand drame révolutionnaire et si cette multiplicité des systèmes vous semble funeste, vous méconnaitrez la plus irrécusable des vérités : « la lumière ne jaillit que de la discussion. »

L’usure 1869-1870
Le sacrifice de l’indépendance individuelle, conséquence forcée de la division du travail, a-t-il été brusque ? Non ! Personne ne l’aurait consenti. Il y a dans le sentiment de la liberté personnelle une si âpre saveur de jouissance que pas un homme ne l’eut échangée contre le collier doré de la civilisation.
Le régime de la division du travail n’a dû remplacer l’isolement individuel que par une série de transformations, réparties sur une période immense ? Chaque pas dans cette voie était applaudi comme une victoire attendue, désirée, et le changement s’est ainsi opéré peu à peu, à travers une longue suite de générations, sans froissement de mœurs, d’habitudes, ni même de préjugés. C’était un progrès décisif sans doute... Mais le prix ? Abandon complet de l’indépendance personnelle ; esclavage réciproque sous l’apparence de solidarité ; liens de l’association serrés jusqu’au garottement. Nul ne peut désormais pourvoir seul à ses besoins. Son existence tombe à la merci de ses semblables. il doit en attendre son pain quotidien, presque toutes les choses de la vie. Car il ne peut se livrer qu’à une industrie unique. La qualité du produit est cette condition qui asservit et, à mesure que la division du travail s’accentue par les perfectionnements de l’outillage, l’homme se trouve plus étroitement rivé à son métier. On sait où en sont venues les choses aujourd’hui. Des êtres humains passent leur existence à faire des points d’aiguille et des têtes d’épingles.
Certes, une telle situation crée des devoirs impérieux entre les citoyens. Chacun d’eux étant voué à une occupation simple, la presque totalité de son produit lui est parfaitement inutile. Ce produit servira par quantités infinitésimales à une foule d’autres individus. L’ensemble de ces consommateurs est donc tenu de fournir aux besoins de celui qui a travaillé pour eux.
La société, dès lors repose sur l’échange. La loi, qui en règle les conditions soit être une loi d’assistance mutuelle, strictement conforme à la justice.

Quand naquit la monnaie, deux procédés s’offraient aux hommes pour l’emploi de ce moyen d’échange : la fraternité et l’égoïsme.

Le communisme, avenir de la société 1869-1870
Sous le régime communautaire, le bien profite à tout le monde et le mal ne profite à personne. Les bonnes récoltes sont une bénédiction, les mauvaises une calamité. Nul ne bénéficie de ce qui nuit aux autres et ne souffre de ce qui leur est utile. Toutes choses se règlent selon la justice et la raison.

Qu’est ce que l’assistance mutuelle, dont le principe reçoit à chaque  instant une application nouvelle et travaille à solidariser peu à peu tous les intérêts ? Une des faces de la transformation qui s’approche. Et l’association, cette favorite de jour, panacée universelle dont les louages retentissent en chœur, sans une seule voix discordante, qu’est ce également sinon la grande avenue et le dernier mot du communisme ?

Ignorance et communauté sont incompatibles. Généralité de l’instruction sans communisme, et communisme sans généralité de l’instruction, constituent deux impossibilités égales. L’homme de la communauté, c’est celui qu’on ne trompe, ni ne mène. Or tout ignorant est une dupe et un instrument de duperie, un serf et un instrument de servitude. Un insensé, sinon un jésuite, a osé dire dans une réunion publique : «  si la société était composée de producteurs, de bons ouvriers, mais ignorants, elle marcherait, tombant de l’exploitation au despotisme, mais elle vivrait. Si la société était composée de savants, nullement producteurs, elle ne saurait vivre ».

Combien faut-il de servitudes pour faire une liberté. 10, 20, 60, 100, 2000, 30000, 100000 ? Innombrables les tarifs, innombrables leurs applications. La chaîne seule ne varie pas.

Le communisme est la sauvegarde de l’individu, l’individualisme en est l’extermination. Pour l’un, tout individu est sacré. L’autre n’en tient pas plus compte que d’un ver de terre.

Disposition immédiates
Or qu’est ce que la force brutale ? c’est l’ignorance, par la grâce du hasard, aux ordres du premier venu, l’ignorance embrigadée, tremblante et soumise, instrument à la fois et victime de la violence. Plus d’ignorants, plus de soldats ! Toute prépotence est anéantie. Qui pourra régenter son voisin ou vivre à ses dépens ? L’égalité sera la première loi, la fraternité et la liberté deviendront ses compagnes naturelles, toujours par nécessité. Le communisme sera certainement la forme obligée d’un tel ordre social, car, seul, il résout, d’après le sens commun, tous les problèmes économiques.

L’ignorant est à peine un homme, et on peut le mener comme un cheval, avec la bride et l’éperon. Le dresser au travail et à l’obéissance, c’est l’unique préoccupation du maître.

Candide, 3 mai 1865
Ainsi la morale, fleur de l’arbre de la pensée, n’est que l’expression plus ou moins puissante de l’instinct humanitaire qui défend aux hommes de s’entrenuire et leur commande de s’entraider. C’est pourquoi le précepte, cependant vieux déjà : « ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas que l’on te fit », loin de tomber en décrépitude, comme toutes les théodicées par le progrès de l’esprit humain, n’a fait que grandir de siècle en siècle, et se dégage avec une irrésistible énergie des décombres de la métaphysique religieuse. Il s’empare des âmes et va bientôt régir le monde. Une trilogie simple et claire, qui exprime le dévouement, le devoir, le droit, deviendra l’application de la morale au gouvernement de l’humanité.
-fais à autrui ce que tu voudrais qu’on te fît… c’est l’idéal.
- ne fais à personne ce que tu ne voudrais pas qu’on te fît… c’est la justice.
- il te sera fait comme tu as fait aux autres…c’est la loi.

Le prétendu respect pour des consciences, qui mettent leur devoir à ne respecter elle-même aucune conscience, deviendrait un outrage au bon sens et une prime à l’extermination. A de tels attentats il faut, sans scrupules et sans hésitation, appliquer la loi légitime : « qu’il te soit fait comme tu as fais aux autres », avec la réserve que le châtiment n’égale pas la faute, autrement dit, que le talion ne rende pas au coupable cruauté pour cruauté.

[Le 4 septembre 1870, aussitôt connue la nouvelle de la capitulation de Sedan, le peuple de Paris sort spontanément dans la rue. Las blanquistes orientent les manifestants. La veille, ils ont reçu de Blanqui l’ordre d’envahir le Corps législatif et de proclamer la république. Ce sont deux blanquistes, Marchand et Granger, qui prononcent la déchéance de l’Empire et et proclament la République. A l’Hôtel de ville, Jules Ferry et Ledru-Rollin usurpent la victoire et mettent en place un « gouvernement de défense nationale » dont Blanqui est soigneusement écarté. A défaut de révolution, la République au moins est acquise.] Le Nuz

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