jeudi 22 octobre 2015

Ecrits - Jim Morrison

Écrits - Jim Morrison



Dans la matrice nous sommes des poissons de caverne aveugles.

Tout est vague et vertigineux. La peau enfle
et il n'y a plus de distinction entre les parties du
corps. On est gagné par le son de voix menaçantes,
moqueuses, monotones. C'est la peur, c'est l'attirance de la dévoration.

A l'intérieur du rêve, boutonne le sommeil autour de ton corps comme un gant. Libre maintenant de l'espace et du temps. Libre de se dissoudre dans l'été qui coule.

Le sommeil est un infra-océan l'on s'y trempe chaque nuit. Le matin, au réveil ruisselant, haletant, les yeux qui piquent.

Rien. L'air au-dehors
brûle mes yeux.
Je les arracherai
Je serai délivré de la douleur.

II n'y a plus de « danseurs », les possédés.
La division des hommes en acteurs et spectateurs  est le fait central de notre temps. Nous sommes obsédés par des héros qui vivent pour nous et que nous punissons. Si toutes les radios et télévisions étaient privées de leurs sources de pouvoir, tous les livres et tableaux brûlés demain, tous spectacles et cinémas fermés, tous les arts de vie par procuration...
Nous nous contentons du « donné » dans la quête des sensations. Nous avons été métamorphosés d'un corps fou dansant sur les collines en une paire d'yeux fixant le noir.


Plus ou moins nous sommes tous affligés d’une psychologie
de voyeur. Pas dans le strict sens clinique ou
criminel mais dans notre attitude physique et
émotionnelle.
Devant le monde. Quand nous cherchons
à briser le sortilège de la passivité, nos actions
sont cruelles, maladroites et généralement obscènes,
comme un malade qui ne sait plus marcher.

Le voyeur est un masturbateur, le miroir est son symbole, la fenêtre sa proie.

Urgence d'en terminer avec le « Dehors », en l'absorbant, l’intériorisant. Je ne sortirai pas, tu dois entrer jusqu’à moi. Jusqu’à mon jardin-matrice d'où je regarde. D'où je peux construire, à l'intérieur du crâne, un univers rival du réel.

Les spectateurs sont des vampires tranquilles.

Le cinéma est le plus totalitaire des arts. Toute énergie, toute sensation se fait sucer jusqu'au crâne érection cérébrale, le crâne bouffi de sang.
Caligula souhaitait un cou unique pour tous ses
sujets afin qu'il puisse décapiter un royaume
d’un seul geste. Le cinéma est cet agent transformateur.
Le corps n’existe que pour les yeux, il
devient une tige sèche qui porte ces deux joyaux
mous et insatiables.

La pellicule confère une espèce de fausse éternité.

Tout film est dépendant lies autres films et y renvoie. Le cinéma était une innovation, un jeu scientifique jusqu'à ce qu’un nombre suffisant d'oeuvres ait été amassé, assez pour créer un autre monde intermittent, une mythologie puissante et infinie dans laquelle plonger à volonté.
Les films donnent l’illusion d’être en dehors du temps, ceci est entretenu par leur régulière et implacable apparition.


L’attrait du cinéma se trouve dans la peur de la mort.

Il est faux de supposer, comme l'ont fait certains, que le cinéma appartient aux femmes. Le cinéma est créé par les hommes pour la consolation des hommes.



Le cinéma a évolué selon deux voies.
L'une est le spectacle. Comme la fantasmagorie, son but est la création d'un substitut total du monde sensoriel.
L'autre c'est le théâtre du mateur, qui revendique comme domaine l'érotique et l'observation non  truquée de la vie réelle, et imite le trou de serrure ou la fenêtre du voyeur sans avoir besoin de couleur, de bruit, de grandeur.


Le cinéma découvre ses plus profondes affinités, non pas avec la peinture, la littérature et le théâtre, mais avec les divertissements populaires — bandes dessinées, échecs, jeux de cartes, tarot, magazines, et tatouages.


Le cinéma ne dérive pas de la peinture, de la littérature, de la sculpture, du théâtre, mais d'une ancienne et populaire tradition de sorcellerie. C'est la manifestation contemporaine d’une longue histoire d'ombres, un ravissement de l’image qui bouge, une croyance en la magie. Son lignage est couplé depuis sa plus lointaine origine avec les prêtres et la sorcellerie, une convocation des spectres. Avec, au début, l’aide modeste du miroir et du feu.
Les hommes ont conjuré de sombres et secrètes visites des régions enfouies de la pensée. Dans ces séances, les ombres sont des esprits qui éloignent le mal.

Le spectateur est un animal mourant.

Il est faux de penser que l'art ait besoin d'un spectateur pour être. Le film continue même sans yeux. Le spectateur ne peut exister sans le film. Qui assure son existence.


Le happening/l’évènement dans lequel l’éther est introduit au travers de fentes d’aération dans une pièce pleine de gens, fait du produit chimique un acteur. Son agent, ou injecteur, est un artiste qui crée un spectacle pour en être lui-même le témoin. Les gens se considèrent comme le public, tout en jouant l’un pour l’autre, et le gaz réalise ses propres poèmes avec le corps humain pour médium. Cela approche de la psychologie de l’orgie tout en restant dans le domaine du Jeu et de ses infinies permutations.
Le but du happening est de guérir l’ennui, de laver les yeux, de refaire avec le courant de la vie des connexions infantiles. La purge de la perception est son but le plus grossier et le plus commun. Le happening tente d’engager tous les sens du corps total et parvient à la réponse totale en vue des arts traditionnels qui insistent sur des voies de sensations plus étroites.


Les premiers cinéastes, qui — comme les alchimistes - prirent plaisir à une obscurité volontaire à propos de leur métier, afin de dissimuler leur technique au regard profane.
• •
Séparer, purifier, réunir. La formule d'
Ars Magna et son héritier, le cinéma.
• •
La caméra est une machine androgyne, une espèce d'hermaphrodite mécanique.


UNE PRIERE AMERICAINE

Savez-vous la chaleur du progrès sous les étoiles ?
Savez-vous que nous existons ?
Avez-vous oublié les clés
du Royaume
Avez-vous déjà été mis au monde & êtes-vous en vie ?


Savez-vous que nous sommes conduits aux massacres par de placides amiraux.
& que de gras et lents généraux sont rendus obscènes par le sang jeune


Accrochez-vous à la vie
            Notre fleur passionnée
Accrochez-vous aux cons & aux bites
            Du désespoir
Notre ultime vision nous a été donnée
            Par la chaude-pisse
L’entrejambe de Colomb s’est
            Gonflé de mort verte


Saviez-vous que la liberté existe dans un livre de classe
Saviez-vous que des fous dirigent notre prison
Dans une geôle, dans un cachot
Dans un tourbillon blanc, libre et protestant


Nous sommes juchés la tête en bas au bord de l'ennui
Nous cherchons à atteindre la mort au bout d'une bougie
Nous essayons de trouver quelque chose
Qui nous a déjà trouvés


Il s'exposait délibérément, et vivait l'horreur de tenter l'assemblage d'un mythe devant un milliard d'yeux mornes, secs et impitoyables. En quittant son avion, il s'avançait résolument vers la clôture métallique, dédaignant les conseils de ses agents, pour toucher des mains. Toutes proches et prêtes à répondre à son invitation à venir l'admirer, de l'adoration ou des armes. Cette constante certitude intérieure inexprimée que son corps était une cible à chaque instant public. Des perceptions nerveuses nouvelles fleurirent au creux du jardin de la moelle épinière de son cou. On disait que lorsqu'il vous regardait, il mettait à nu le contenu de votre boîte crânienne. Naturellement. Car les sourires d'un admirateur bien intentionné cachent aisément la mort derrière des dents de chat. Ni paranoïa ni insouciance ignorant la mort, mais une connaissance délicate et sensuelle de la violence dans un présent éternel.
Cyclopes. Les gens qui ressemblent aux lézards primitifs ont un joyau à l'intérieur du crâne. Appelé la « glande pinéale », il est situé dans le cerveau à la jonction des deux hémisphères du cervelet. Chez certains individus ce vestige de troisième œil est encore sensible à la lumière.
L'œil résiste à une analyse séparée. Prenez conscience que les yeux sont en fait deux globes mous qui flottent dans l'os.
Les impressions me voient.
Demandes à quiconque quel sens il préserverait par-dessus tout autre. La grande majorité répondrait la vue, abdiquant un million d'yeux à l’intérieur du corps en faveur de deux yeux dans le crâne. Aveugles, nous pourrions vivre et peut-être trouver la sagesse. Sans le toucher, nous deviendrions des blocs de bois.
L’œil est une bouche avide
Qui se nourrit du monde.
Architecte de mondes-images
En concurrence avec le réel.
Il y a des planètes jumelles
Dans le crâne.
L’œil est dieu. Et il est le monde,
Car il a son propre équateur.
Arrachez l’œil d’un animal dans l'obscurité et placez-le devant un objet, clair et brillant, une fenêtre se détachant sur le ciel. Le contour de cette image se grave sur la rétine, visible à l’œil nu. Cet œil excisé est un appareil photographique primitif, le pourpre rétinien tenant lieu d'émulsion.
Kuhne [Wilhelm Kuhne, physiologue allemand du XIX siècle qui fit d’importantes découvertes dans le domaine de la chimie de la digestion et dans celui de la physiologie des muscles et des nerfs.], à la suite des résultats positifs qu'il avait obtenus sur des lapins, se vit présenter la tête d’une jeune victime de la guillotine. L’œil fut extrait et fendu suivant son équateur. L'opération fut réalisée dans une pièce spéciale, rouge et jaune. La rétine de l’œil gauche présentait une image distincte mais ambiguë, impossible à déterminer. Il passa les années suivantes à rechercher sa signification, la nature exacte de l'objet, si objet il y avait.
Les fenêtres sont les yeux de la maison. Regardez à l'extérieur de votre prison corporelle, d'autres jettent un coup d'œil à l'intérieur. Le mouvement n'est jamais à sens unique. « Voir » implique toujours l’éventualité d'une atteinte à notre intimité, car en nous dévoilant l’immensité du monde extérieur, nos yeux ouvrent aux autres l'accès de l'infinité de nos propres espaces intérieurs.
Quel est le sort des yeux pendant le sommeil ? Ils bougent constamment, comme les spectateurs d’un théâtre.
Les pupilles se dilatent lors d’états anormaux. Les drogues, la folie, l’ébriété, la paralysie, l'épuisement, l’hypnose, le vertige, une intense excitation sexuelle. L'œil découvrant son océan lorsque l’idée même d’océan est révolue.

Enkidu était un homme sauvage, un animal parmi les animaux.
Un jour, à un point d'eau, une femme offrit sa nudité à son regard, et il y fut sensible. Ce jour-là il partit avec elle pour se conformer aux artifices de la civilisation.
Le choix d'un partenaire pour l'accouplement est d’abord basé sur l’attrait visuel. Pas sur l'odeur, le rythme, la peau. C’est une erreur de croire que l’œil peut caresser une femme. Une femme est-elle faite de lumière ou de chair ? Son image n'a jamais de réalité pour l'œil, elle s’inscrit aux bouts de vos doigts.
Dans l'Ars Magna, la Grande Œuvre, l'Alchimiste crée le monde dans sa cornue.
Les yeux sont les organes génitaux de la perception, et eux aussi ont établi une tyrannie. Ils ont usurpé l'autorité des autres sens.
Le corps devient une mince tige maladroite pour supporter l'œil dans ses rondes.
De quel droit les yeux devraient-ils être qualifiés de « fenêtres de l’âme » et de clé de la communion humaine la plus profonde, et le toucher réduit à un vague contact charnel.
Le corps n'est pas la maison, il est l'intérieur de la maison.
Les aveugles copulent, des yeux dans leur peau.
L’œil est de la « lumière au repos ».
(Est-ce nous qui créons la lumière dans l'œil ? La lumière est-elle nôtre, ou nous vient-elle du monde ?)
Dans la mythologie égyptienne, l'œil est le symbole d’Osiris, d'Isis, d’Horus, et du dieu soleil Râ.
Ptah enfanta les hommes par sa bouche, les dieux par ses yeux.


Temple-cité de Brak (3000 av. J.-C.). Découverte de milliers de petits visages humains plats en albâtre noir et blanc, dépourvus de nez, de bouches, d'oreilles, mais aux yeux gravés et minutieusement peints. Appelé le Temple de l'Œil: pour abriter ces offrandes à une divinité.
Œdipe,  «Réalité » de ses seins dénudés. Son corps. « Tu as porté ton regard sur ce que tu n’aurais jamais dû voir. » Yeux arrachés avec une broche de la robe de la défunte Jocaste.
Punissez les yeux. Seins ridés d’une vieille femme. Il est conduit de village en village par un jeune garçon. Et partout ils attendent ses paroles.
Tiresias, dont on dit que pendant sept ans il se fit passer pour une femme, découvrit par hasard Athéné qui se baignait dans la forêt. Elle rendit aveugles les yeux importuns.
Saül de Tarse sur la Route de Damas. La cécité l’éleva jusqu'à saint Paul.
Pourquoi la cécité est-elle signe de sainteté ?
L’alchimie offre à l’homme une forme originale d’héroïsme. Le Mani [J. Mani, fondateur au troisième siècle en Iran de la religion manichéenne, interprétation dualiste du monde, qu’elle divise entre bien et mal. Il prêchait l’ascétisme et répandit sa nouvelle foi à travers la Perse entière] enseignait que l’homme est un aide créé par le Dieu Suprême de la Lumière pour contribuer par sa vie et par ses efforts au rassemblement des atomes de lumière diffus, et de ce fait affaiblit, et pour les élever de nouveau. Car la lumière a brillé dans les ténèbres et s’est gaspillée, et elle est en grand danger d’être entièrement absorbée.
Le procédé de transformation des métaux de base en or est appelé « projection ».
Dans la pénombre, la forme est sacrifiée à la lumière. En pleine lumière, là lumière est sacrifiée à la forme.
Code de la lumière. L'oeil est malade. Arrachez-le. Le docteur supprime l'œil pour sauver le corps. Pour ce faire, il doit sectionner le nerf optique qui relie l'œil au cerveau. Avant la pratique de l'anesthésie, on a souvent rapporté que l'incision du scalpel induisait de la lumière au lieu de la douleur.
Progressivement, les objets se définissent à l'extérieur du corps.
L'œil est issu de la lumière, pour la lumière. Des organes et des surfaces indistinctes évoluent vers leur forme unique. Le poisson est façonné par l'eau, l'oiseau par l'air, le ver par la terre. L'œil est une créature du feu.


Une vaste grève rayonnante sous la lumière fraîche de la lune
Des couples nus dévalent la plage dans sa quiétude Et nous rions comme des entants doux et sauvages Satisfaits de leurs cerveaux en doux coton de l'enfance.
Musique et voix nous entourent.
Choisit, gémissent-ils, les Anciens
Le tempe est revenu.
Choisis maintenant, gémissent-ils,
Là, sous la lune
Au bord d'un vieux lac.
Entre encore dans l'humide forêt,
Entre dans le rêve brûlant,
Viens avec nous.
Tout s'est brisé et danse.


Images d'hiver, notre amour désespère
Images d'hiver, notre amour désespère
Reste éveillé, parlant, fumant jusqu'à demain Compte les morts et attends le matin.
Les doux noms et les visages reviendront-ils ?
La forêt d'argent finit-elle ici ?
Pourquoi mes pensées autour de toi tournoient ?
Pourquoi les planètes s'étonnent-elles
De ce que ce serait si elles étaient toi ?
Toutes tes promesses douces et sauvages n'étaient que mots
Des oiseaux en vol, sans fin.


Aujourd'hui les portes de toutes les salles de projection sont faites d’acier.
Le cinéma exclut-il la lumière ou inclut-il l’obscurité ?
Que signifie cela ? La main de l'artiste tranche le globe oculaire de la femme. Des nuages en rasoir fendent la lune. Expression cosmique.
Il a percé la pustule gonflée de la vue.


Ce solide ami et les bêtes de son zoo,
Poules aux crinières sauvages,
Femmes épanouies au sommet,
Monstres de la peau.
Chaque couleur s'allie
pour construire le bateau qui berce l’homme.
Y aurait-il un enfer plus horrible qu'ici
et maintenant ?
J'ai serré sa cuisse et la mort a souri.
Mort, vieille amie,
La mort et ma bite sont le monde.
Je pardonne mes blessures au nom de Sagesse Luxe Romance
Phrase à phrase
Les mots sont des complaintes apaisantes Car la mort de l’esprit de ma bite Ne signifie rien dans le doux feu.
Des mots m'ont meurtri et ils me guériront,
Si tu le crois.
Joignez-vous tous maintenant et lamentez-vous sur la mort
[de ma bite
Une langue sagace dans la nuit emplumée.
Les gars deviennent fous et souffrent,
Je sacrifie ma bite sur l'autel du silence.


PROLOGUE
AUTO-INTERVIEW
Je crois que l’interview est une nouvelle forme d'art. L'auto­interview est l'essence de la créativité. Se poser des questions et essayer de trouver les réponses. L'écrivain ne fait que répondre à des questions qui n'ont pas été posées.
C'est un peu comme être appelé à la barre des témoins. C'est cette région étrange dans laquelle vous essayez de fixer quelque chose qui est arrivé dans le passé. Vous cherchez à vous souvenir, honnêtement, de ce que vous tentiez de faire à ce moment-là. C'est un exercice montai périlleux. Une interview vous donnera souvent l'occasion d’interroger votre esprit, ce qui est, à mon avis, la définition de l’art. La chance vous est offerte d’éliminer tout remplissage... Vous devez être explicite, précis, aller directement à l’essentiel... Pas de conneries. On trouve les antécédents de l’interview au confessionnal, dans un débat ou un contre- interrogatoire. Une fois la chose dite vous ne pouvez pas la retirer. Trop tard. C’est un moment existentiel.
Je suis, en quelque sorte, « accro » au jeu de l'art et de la littérature ; mes héros sont des artistes et des écrivains.
J’ai toujours désiré écrire, mais je me figurais que rien de bon ne sortirait. A moins que, pour une raison quelconque, ma main se mette au travail sans que j'y sois vraiment pour quelque chose. Comme l'écriture automatique, mais cela n'est jamais arrivé.
Bien sûr j'ai fait des poèmes. Notamment « Le Pony Express » [Pony Express : légendaire courrier de l’époque héroïque des diligences entre St Joseph (Mo.) et Sacramento (Californie)] quand j'étais en classe de sixième ou cinquième. C'est le premier que je me rappelle. C'était un poème dans le style ballade mais je ne l'ai jamais vraiment achevé.
« Les Latitudes du Cheval » remontent à mes années au lycée. Au cours de mon adolescence j'ai rempli des tas de carnets. Puis, quand j'ai quitté l'école, je les ai tous jetés... pour des raisons stupides, peut-être par sagesse ? Je remplissais ces pages nuit après nuit. Si je ne les avais pas jetés, sans doute n’aurais-je jamais écrit quoi que ce soit d'original. Ils étaient, essentiellement, des accumulations de choses que j’avais lues ou entendues, des citations tirées de livres. Si je ne m'en étais pas débarrassé, je crois que je n'aurais pas pu être libre.
La vraie poésie ne veut rien dire, elle ne fait que révéler les possibles. Elle ouvre toutes les portes. A vous de franchir celle qui vous convient.
...C'est la raison pour laquelle je suis tellement attiré par la poésie, elle est si éternelle. Tant qu'il y aura des hommes, ils pourront se souvenir des mots et de leurs combinaisons. Seules la poésie et les chansons peuvent survivre à un holocauste. Personne ne peut mémoriser un roman entier, un film, une sculpture ou une peinture. Mais, tant qu'il y aura des êtres humains, les chansons et la poésie pourront se perpétuer.
Si ma poésie a un but, c'est de libérer les gens de leurs œillères, de démultiplier leurs sens.
Jim Morrison Los Angeles, 1969-70



Que fais-tu ici ?
Que veux-tu ?
De la musique ?
Nous pouvons faire de la musique.
Mais tu veux plus.
Tu veux quelque chose et quelqu’un de nouveau.
Ai-je raison ?
Bien sûr.
Je sais ce que tu veux.
Tu veux l'extase Le désir et le rêve.
Les choses ne sont pas vraiment ce qu'elles semblent. Je te conduis dans ce sens, il tire dans l'autre.
Je ne chante pas pour une fille imaginaire.
C'est à toi que je parle, à moi-même.
Recréons le monde,
Le palais de la conception brûle.
Regarde. Vois-le brûler.
Se dorer aux charbons incandescents.
Tu es trop jeune pour être vieux
Tu n’as pas besoin de leçons
Tu veux voir les choses comme elles sont.
Tu sais exactement ce que je fais
Tout


L’instant est béni
Tout le reste est
souvenir



Un ange passe
Dans un éclair
Dans la chambre
Un fantôme nous précède
Une ombre nous suit
Et chaque fois que nous nous arrêtons
Nous tombons


Personne n’a inventé l'existence ; que celui qui croit l’avoir fait s'avance


LA PEUR
La conscience éternelle
du Vide
(en comparaison procès et prison semblent presque
amicaux)
un Baiser sous l'Orage
(Fou au volant arme sur la nuque espace populeux s'incurvant froidement)
Une grange
le grenier d'une cabane
Ton propre visage imprimé
sur le miroir de la fenêtre
peur du néon
Froid et tragique
des toilettes
Je suis transi



Tes yeux
Me troublent
Infiniment
Ta douce
Réponse me frappe
Comme une plume
Le son du verre
Révèle un vif
Dédain
Et dissimule
Ce que tes yeux s'efforcent
D'expliquer



« Oh mon Dieu, s'écria-t-elle
Je n’ai jamais su ce
qu’exister signifiait
Je pensais que tout ceci n’était qu’une blague,
Je n’ai jamais laissé l’horreur, ou
la douceur et la dignité
pénétrer mon cerveau »
« Laisse-moi me lever pour regarder
à la fenêtre. Des Cavaliers Noirs
passent dans le crépuscule
rentrant chez eux
après leurs équipées.
Les tavernes seront
pleines de rires, de vin,
plus tard de danses, plus tard encore
de dangereux coups de couteau.
Antonio sera là
et cette putain, la Dame Bleue
jouant aux cartes avec des jeux
d'argent et souriant à la nuit,
des verres pleins seront levés au ciel
et versés en offrande à la lune.
Je suis triste, si pleine de tristesse »


La maison brûle ? Ainsi soit-il.
Le Monde, un film imaginé par les hommes,
La fumée dérive à travers ces pièces
On tue dans une chambre.
Des mimes chantent, des oiseaux se taisent et roucoulent
Ça ira comme ça ?
Prise 2.


Chaque journée est un élan qui traverse l’histoire



c'est drôle,
j'espère encore
que l'on va frapper à la porte
voilà ce que vous
gagnez à vivre parmi
les hommes
Si l'on frappait ? mes rêves
illusoires, mon maintien et
mon sang-froid voleraient en éclats
Le combat d'un pauvre poète
pour ne pas tomber sous l'emprise
des romans, des jeux de hasard
et au journalisme



Une propension à l'ignorance,
à l'autodéception peut être
nécessaire à la survie du
poète.


Les acteurs doivent nous faire croire
à leur réalité
Nos amis ne doivent pas
nous donner l'impression que nous jouons la comédie
Les voici, pourtant, dans la lenteur
du Temps
Mes mots fous
glissent en fusion  
et risquent de perdre
contact avec le sol
Alors étranger, deviens
plus fou encore
Explore les Hautes Terres


Pourquoi je boit ?
Four pouvoir écrire de la poésie.
Parfois lorsque tout est diffus
et que toute Laideur s'efface
en un profond sommeil
Il y a un éveil
et tout ce qui demeure est vrai.
Tandis que le corps est ravagé
l'esprit se fortifie.
Pardonne-moi mon Père car je sais
ce que je fais.
Je veux entendre le dernier Poème
du dernier Poète.


I
Je ne reviendrai pas
Je ne reviendrai pas
dans le tourbillon
Imbibé de vin l'amer étalon
mange la semence,
tout travail est mensonge ;
nul vice n'enflamme
ces reins pour se fondre
ou rivaliser avec un sourire
d'une âpre exigence.
Laissez vivre les multiples pierres.
II
Maintenant que tu t'en es allée
Toute seule
explorer le désert
me laissant seul ici
le calme de la ville
une fille en noir
monte dans une voiture
et cherche maladroitement
ses clés ;
Maintenant que tu t'en es allée
ou que tu t'es égarée —



Je m'assieds, j'écoute le sifflement
de la circulation et j'invoque,
dans cette chambre incendiée,
dévastée, un fantôme, quelque
vague ressemblance d'un autre temps
De temps en temps,
comme un long rêve
électrique et malsain.
C'est un état confus.
Là-bas tout le monde
est avide de son amour.
Ils draineront sa vie
comme de chauds connecteurs,
S’infiltreront dans son âme t
Par tous les côtés et fondront
La forme qu'elle avait pour moi.
je le mérite,
De tous les cannibales je suis le plus grand,
Un avenir de fatigue.
Laissez-moi dormir.
Poursuivre ma maladie.


Par ce cri de gorge
Cet appel su sexe
Nous devons encore essayer
De parler des distances
Discontinues de sommeil qui nous
Entourent
Traversant le sommeil à tâtons
Numéros aveugles
Dans une pièce carrelée
Nous nous asseyons et broyons du noir
Nous refusons de bouger
Les gardes refusent
Et au dernier endroit
Dans la douceur du dernier souffle
Au rythme du crabe géomètre
Sous la multitude des étoiles, étoiles d’avidité
Sans les écritures et les majestés
Dans l’accomplissement au sommet d’une falaise
Sous la couche de fard
Sur des dos plats et sur des chameaux
Dans le vaisseau ouvert
Dans la veine
Dans des vies obscures
Qui ont été témoins de tout



Se demander soudain si
Le monde est réel
S’il est las de la forme dont
Elle est faite. Quelle errante
Folie avons-nous négligemment créée ?
Personne ne l’a voulu, c’est certain
Quelqu’un a commencé, c’est sûr
Où est-il ?
Où est-il, l’être, l’objet,
Quand nous avons besoin d’elle ?
Où es-tu ?
Dans une fleur ?
Etre né pour la seule
Beauté et voir la tristesse
Quelle est cette frêle maladie ?



Ceux qui Courent vers la Mort
Ceux qui attendent
Ceux qui s’inquiètent


Quand je jette un regard
en arrière sur ma vie
je suis frappé par des cartes
postales
Instantanés Détériorés
posters fanés
D'un temps, qui m’échappe.



Nous devons attacher ensemble toutes ces impressions désespérées


tu dois affronter
ta vie
qui, à la dérobée,
se glisse sur toi
comme un serpent lové
extasié
bave d'escargot
tu devras affronter
l'inévitable
un jour ou l'autre
Bloody Bones t'a bien eu !


l'espoir n'est qu'un mot
quand on pense en termes
de Nappes
Le rire ne peut détruire
sa drôle de sensation
ni satisfaire notre
étrange désir
Des enfants naîtront


Cock-pit
Je suis vrai
Prends-moi en photo
Il est vrai, pris
La réalité est ce qui nous
a été caché
si longtemps
la naissance le sexe la mort
nous sommes vivants quand nous rions
quand nous sentons le sang
affluer et jaillir
le sang est vrai dans sa rougeur
l'arc-en-ciel est vrai dans
son absence de sang


Certaines images me sont nécessaires pour parfaire ma propre réalité


Les rêves sont à la fois le fruit de l’atrophie des sens et une protestation contre elle.
Rêver n’est pas une solution


Les avions sont des mères gémissantes
Dans nos piètres guerres d’insectes.
Des préservatifs de nylon dégoulinent derrière elle Guerrier Troyens dans leur fuite atroce et convulsée
Largué, aspiré
de son ventre de métal,
il ne reste qu'un mince fil de fer prophétisant le retour,
saute en liberté.
Avalant l’air dans le court canal,
Le sol bondit comme les chiens
pour happer, le champ, et le douloureux tournis.
Marécages, champs de riz, danger.
Abattus, plus de dix d’entre eux
se débattant avec le placenta humide
Tandis que d’autres réamerrissent dans les océans. Plongeurs qui flottent, flottent en liberté,
dans l'utérus.
La mer est un Vagin qui
peut-être pénétré à n’importe quel point.



OURAGAN ET ECLIPSE
J'aimerais qu'une tempête arrive
et que son souffle chasse cette crasse.
Ou qu'une bombe incendie la Ville et
récure la mer. J'aimerais que la mort
vienne à moi, immaculée.


Si seulement je
pouvais sentir
Le pépiement
des moineaux
sentir l'enfance
me ramener
à elle
Si seulement je pouvais
me sentir ramené
à elle
me sentir une nouvelle fois
embrassé par
la réalité
Je mourrais
Avec joie je mourrais



Le rêve s’achèvera
Quand il aura
De l’importance
Tout est mensonge
Bouddha me pardonnera
Oui, Bouddha me pardonnera



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