Les tragiques - Agripa d'Aubigné
MISÈRES
Souviens-toi quelques jours combien sont ignorants
Ceux qui pour être Rois veulent être tyrans.
Ces tyrans sont des loups, car le loup, quand il entre
Dans le parc des brebis, ne suce de leur ventre
Que le sang par un trou et quitte tout le corps,
Laissant bien le troupeau, mais un troupeau de morts :
Nos villes sont charogne, et nos plus chères vies,
Et le suc et la force en ont été ravies;
Le pays ruinés sont membres retranchés
Dont le corps sèchera, puisqu'ils sont asséchés.
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Celui qui meurt pour soi, et en mourant machine
De tuer son tueur, voit sa double ruine:
il voit sa place prête aux abîmes ouverts,
Satan grinçant les dents le convie aux enfers.
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Ne tyrannisons point d'envie notre vie
PRINCES
Quant le peuple gémit sous le faix tyrannique,
Quand ce siècle n'est rien qu'une histoire tragique,
Ce sont farces et jeux toutes leurs actions;
JUGEMENT
Mes sens n'ont plus de sens, l'esprit de moi s'envole,
Tout meurt, l'âme s'enfuit, et reprenant son lieu
Extatique se pâme au giron de son Dieu.
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