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vendredi 18 juillet 2025

Cratyle - Platon

Cratyle - Platon

Introduction

Protagoras se présente comme un grand défenseur des vertus de l'éducation (et pour lui, le plus important dans l'éducation est de comprendre la poésie) ; il croit aux vertus gnoséoloques et didactiques du "discours le plus fort" qui est aussi le "discours le plus droit" conforme à la "loi".

La position de Cratyle selon laquelle un mot incorrectement attribué n'est pas un nom se relie clairement dans le texte à la thése éléatique de l'impossibilité du "dire faux", thèse très répandue dont Protagoras et son école se servaient beaucoup. 

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Hermogène. — Ma foi, Socrate, je me suis souvent, pour ma part, entretenu avec lui et avec beaucoup d’autres, d sans pouvoir me persuader que la justesse du nom soit autre chose qu’un accord et une convention. À mon avis, le nom qu’on assigne à un objet est le nom juste ; le change-t-on ensuite en un autre, en abandonnant celui-là, le second n’est pas moins juste que le premier ; c’est ainsi que nous changeons le nom de nos serviteurs, sans que le nom substitué soit moins exact que le précédent. Car la nature n’assigne aucun nom en propre à aucun objet : c’est affaire d’usage et de coutume chez ceux qui ont pris l’habitude de donner les noms. Mais s’il en va autrement, je suis prêt, quant à moi, e à m’en instruire, et à l’entendre non seulement de la bouche de Cratyle, mais de n’importe quel autre. 

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Socrate. — On peut donc dire un nom vrai ou faux, si c’est possible du discours ?

Hermogène. — d Évidemment. 

Socrate. — Le nom que chacun attribue à un objet est donc le nom de chacun ?

Hermogène. — Oui. 

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Socrate. — Et parler, n’est-ce pas aussi un acte ?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Est-ce donc en suivant son opinion particulière sur la façon dont on doit parler qu’on parlera correctement ? N’est-ce pas en se réglant sur la manière et les moyens qu’ont naturellement les choses d’exprimer c et d’être exprimées par la parole, qu’on réussira à parler, sans quoi l’on manquera le but et l’on n’aboutira à rien ?

Hermogène. — Je suis de ton avis. 

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d Pour ceux qui croient l’univers en mouvement, sa plus grande partie n’a d’autre caractère que de se déplacer, et ce tout est parcouru d’un bout à l’autre par un principe auquel tout ce qui naît doit la naissance. Ce principe, d’après eux, est très prompt et très subtil ; autrement il ne pourrait traverser tout le réel, s’il n’était assez subtil pour que rien ne pût l’arrêter, ni assez prompt pour qu’auprès de lui le reste fût comme immobile. Quoi qu’il en soit, comme il gouverne tout le reste en le parcourant (diaïon), e on lui a donné avec raison le nom de juste (dikaïon), en y ajoutant pour l’euphonie l’effet du k. Jusqu’ici, encore une fois, beaucoup s’accordent sur cette explication du juste.  

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Socrate. — Doxa (opinion) a dû son nom soit à la poursuite (diôxis) que mène l’âme, cherchant à savoir la nature des choses, soit au coup parti de l’arc (toxon). C’est plutôt, semble-t-il, cette explication. En tout cas, la croyance (oïêsis) s’accorde avec elle. C’est en effet l’élan (oïsis) c de l’âme vers l’objet, pour connaître la qualité de chaque être, que le nom paraît indiquer, de même que la volonté (boulê) désigne le jet (bolê) et que boulesthaï (vouloir) signifie éphiesthaï (tendre vers) comme aussi bouleuesthaï (délibérer). Tous ces mots, à la suite de doxa, semblent figurer le jet (bolê), de même qu’inversement l’irréflexion (aboulia) paraît être le fait de manquer le but (atukhia), en tant que l’on ne frappe (ou balôn) ni n’atteint (ou tukhôn) ce qu’on cherchait à frapper, ce qu’on voulait, l’objet d’une délibération et d’une aspiration.  

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Socrate. — Eh bien, ce nom semble forgé d’après une proposition disant que le nom (onoma) est l’être sur lequel porte la recherche. Tu le reconnaîtras encore mieux dans ce que nous appelons onomaston (ce qui est à nommer). Car ici l’expression est claire : il s’agit de l’être qui est objet d’enquête (on hou mâsma). Alêtheïa (vérité), b à son tour, ressemble aux autres noms, et paraît être un composé ; c’est le mouvement divin de l’être qui semble désigné par cette locution, alêtheïa, entendue comme une course divine (alê théïa). Pseudos (mensonge) est l’opposé du mouvement ; nous voyons encore revenir les injures adressées à ce qui est arrêté et contraint de rester en repos ; il a été formé par comparaison avec les gens endormis ([kath]eudousi), mais l’addition du ps cache le sens du nom. On (être) et ousia (essence) disent la même chose que alêthés (le vrai), en prenant l’i ; être, en effet, signifie allant (ion), et non-être (ouk on), à son tour, comme l’indique le nom que certains lui donnent, c veut dire n’allant pas (ouk ion).  

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Socrate. — Le raisonnement est trop subtil pour moi et pour mon âge, mon camarade. Cependant, une question encore : s’il est impossible de parler faux, n’est-il pas possible, à ton avis, e d’affirmer des faussetés ?

Cratyle. — Pas davantage d’en affirmer.

Socrate. — Ni d’en énoncer, ni d’en adresser ? Suppose, par exemple, que quelqu’un, te rencontrant à l’étranger, te prenne la main en disant : « Salut ! étranger athénien, Hermogène, fils de Smicrion » ; ces mots, les dira-t-il, ou les affirmera-t-il, ou les énoncera-t-il ? S’adressera-t-il ainsi, non pas à toi, mais à Hermogène ici présent ? ou à personne ?

Cratyle. — À mon avis, Socrate, il n’émettra que de vains sons. 

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mercredi 28 janvier 2015

Platon - Ion



Platon - Ion 

SOCRATE.
Ainsi, en résumé, quand on parle des mêmes choses, ce sera toujours le même homme qui remarquera ceux qui en parlent bien, et ceux qui en parlent mal : et il est évident que s'il ne distingue pas celui qui en parle mal, il ne distinguera pas celui qui en parle bien, j'entends à l'égard de la même chose.
ION.
J'en conviens.
SOCRATE.
Le même homme par conséquent est habile à-la-fois et sur l'un et sur l'autre ?

Platon - Criton



Platon - Criton

SOCRATE.
, ce que je disais tout-à-l’heure, savoir, que parmi les opinions des hommes, il en est qui sont dignes de la plus haute estime, et, d’autres qui n’en méritent aucune.

SOCRATE.
II ne faut donc pas, mon cher Criton, nous mettre tant en peine de ce que dira de nous la multitude, mais bien de ce qu’en dira celui qui connaît le juste et l’injuste ; et celui-là, Criton, ce juge unique de toutes nos actions, c’est la vérité. Tu vois donc bien que tu partais d’un faux principe, lorsque tu disais, au commencement, que nous devions nous inquiéter de l’opinion du peuple sur le juste, le bien et l’honnête, et sur leurs contraires. On dira peut-être : Mais enfin le peuple a le pouvoir de nous faire mourir.

SOCRATE.
Admettons-nous qu’il ne faut jamais commettre volontairement une injustice ? Ou l’injustice est-elle bonne dans certains cas, et mauvaise dans d’autres ? ou n’est-elle légitime dans aucune circonstance, comme nous en sommes convenus autrefois, et il n’y a pas long-temps encore ?

SOCRATE.
Je poursuis, ou plutôt je te demande : Un homme qui a promis une chose juste doit‑il la tenir, ou y manquer ?

SOCRATE.
Et les lois que diront-elles ? « Socrate, est-ce de cela que nous sommes convenus ensemble, ou de te soumettre aux jugements rendus par la république ? »

Platon - Apologie de Socrate



Platon - Apologie de Socrate


Ainsi mettez-vous dans l’esprit que j’ai affaire à deux sortes d’accusateurs, comme je viens de le dire ; les uns qui m’ont accusé depuis long-temps, les autres qui m’ont cité en dernier lieu ; et croyez, je vous prie, qu’il est nécessaire que je commence par répondre aux premiers ; car ce sont eux que vous avez d’abord écoutés, et ils ont fait plus d’impression sur vous que les autres.

: Socrate est un homme dangereux qui, par une curiosité criminelle, veut pénétrer ce qui se passe dans le ciel et sous la terre, fait une bonne cause d’une mauvaise, et enseigne aux autres ces secrets pernicieux.


Voilà contre mes premiers accusateurs une apologie suffisante ; venons présentement aux derniers, et tâchons de répondre à Mélitus, cet homme de bien, si attaché à sa patrie, à ce qu’il assure. Reprenons cette dernière accusation comme nous avons fait la première ; voici à-peu-près comme elle est conçue : Socrate est coupable, en ce qu’il corrompt les jeunes gens, ne reconnaît pas la religion de l’état, et met à la place des extravagances démoniaques. Voilà l’accusation ; examinons-en tous les chefs l’un après l’autre.


Tout homme qui a choisi un poste, parce qu’il le jugeait le plus honorable, ou qui y a été placé par son chef, doit, à mon avis, y demeurer ferme, et ne considérer ni la mort, ni le péril, ni rien autre chose que l’honneur.


Comment, étant Athénien, de la plus grande ville et la plus renommée pour les lumières et la puissance, ne rougis-tu pas de ne penser qu’à amasser des richesses, à acquérir du crédit et des honneurs, sans t’occuper de la vérité et de la sagesse, de ton âme et de son perfectionnement ?


Je ne cesse de vous dire que ce n’est pas la richesse qui fait la vertu ; mais, au contraire, que c’est la vertu qui fait la richesse, et que c’est de là que naissent tous les autres biens publics et particuliers.

Si la mort est la privation de tout sentiment, un sommeil sans aucun songe, quel merveilleux avantage n’est-ce pas que de mourir ?