La difficulté d’être –
Jean Cocteau
DE
MON STYLE
Je ne suis ni gai ni triste. Mais je peux être tout l’un ou tout l’autre
avec excès. Dans la conversation, si l’âme circule, il m’arrive d’oublier les
chagrins que je quitte, un mal dont je souffre, de m’oublier moi- même, tant
les mots me grisent et entraînent les idées. Elles me viennent bien mieux que
dans la solitude et, souvent, un article à écrire m’est un supplice, alors que
je le parle sans effort. Cette ivresse de la parole laisse entendre que je
possède une facilité que je n’ai pas. Car aussitôt que je me contrôle, cette
facilité cède la place à un travail pénible dont la côte me semble à pic et
interminable. Il s’y ajoute une crainte superstitieuse de la mise en marche que
j’ai toujours peur de mal engager. Cela me donne une paresse et ressemble à ce
que les psychiatres appellent « l’angoisse de l’acte ». Le papier blanc,
l’encre, la plume m’effraient. Je sais qu’ils se liguent contre ma volonté
d’écrire. Si j’arrive à les vaincre, alors la machine s’échauffe, le travail me
travaille et l'esprit va. Mais il importe que je m'y mêle le moins possible,
que je somnole à demi. La moindre conscience de ce mécanisme l’interrompt. Et
si je veux le remettre en marche, il me faut attendre qu’il s'y décide, sans
essayer de le convaincre par quelque piège. C'est pourquoi je n’use pas de
tables qui m’intimident et ont un air d’invite. J'écris à n'importe quelle
heure, sur mes genoux. Pour les dessins, c’est de même. Je sais, bien sûr, en
imiter la ligne, mais ce n'est pas elle, et la ligne véritable me sort quand
elle veut.
Mes rêves sont presque
toujours des charges si graves et si précises de mes actes qu'ils pourraient me
servir de leçons. Mais ils caricaturent, hélas, l’organisme même de l'âme et me
découragent plutôt qu’ils ne me donnent le moyen de me combattre. Car nul ne
connaît mieux que moi ses faiblesses, et lorsqu’il m'arrive de lire quelque
article contre ma personne, je pense que je frapperais plus juste, que le fer
s'enfoncerait jusqu'à la garde et qu’il ne me resterait qu’à plier les jambes,
à tirer la langue et à m’agenouiller dans l’arène.
Il ne faut pas confondre l’intelligence, adroite à duper son homme, et cet
organe dont le siège n’est nulle part et qui nous renseigne sans appel sur nos
limites. Nul qui puisse les escalader. L’effort s’y devinerait. Il soulignerait
davantage le faible espace dévolu à nos voltes. C’est à cette faculté de nous
mouvoir dans cet espace que le talent se prouve. Nos progrès ne peuvent venir
que de là. Et ces progrès ne seront que d’ordre moral puisque chacune de nos
entreprises nous prend à l’improviste. Nous n’y pouvons compter que sur la
rectitude. Toute tricherie en amène une autre. Mieux vaut une maladresse. Le
public anonyme la siffle, mais nous la pardonne. Les tricheries agissent à la
longue. Le public se détourne avec le regard mort d’une femme qui aimait et qui
n’aime plus.
C’est pourquoi je me
suis appliqué à ne pas perdre mes forces à l’école. Je lâche mille fautes que
je corrige mal, paresseux à me relire et ne relisant que l’idée. Si la chose à
dire est dite, peu m’importe. Je n’en possède pas moins ma méthode. Elle
consiste à être rapide, dur, économe de vocables, à dérimer la prose, à viser
longuement sans style de tir, et à faire mouche, coûte que coûte.
A me relire avec le
recul, je n’ai honte que des ornements. Ils nous nuisent, car ils distraient de
nous. Le public les aime, il s’en aveugle et néglige le reste. J’ai entendu
Charles Chaplin se plaindre d’avoir laissé dans son film la Ruée vers l’or
cette danse des petits pains dont chaque spectateur le félicite. Il n’y voyait
qu’une tache qui tire l’œil. Je lui ai aussi entendu dire (au sujet du style
ornemental) qu’après un film il « secouait l’arbre ». Il faut, ajoutait-il, ne
garder que ce qui tient aux branches.
DE
LA FRIVOLITE
Notre
époque est fort malade. Elle a inventé « l’évasion ». Les horreurs dont
souffrent les victimes de la frivolité d’une guerre lui fournissent bien
quelques dérivatifs. Elle s’en drogue par l’entremise de ses journaux et même
la bombe atomique lui procure un lyrisme à la Jules Verne — jusqu’au moment où
un farceur la berne par la voie des ondes. Orson Welles annonce l’arrivée des
Martiens. Une radio française, celle d’un bolide. Aussitôt nos foudres de
guerre ne songent plus à s’évader par l’esprit, mais par les jambes. Ils se les
rompent. Ils se sauvent. Ils s’évanouissent. Ils avortent. Ils appellent au
secours. Cest au point que le gouvernement s’émeut et interdit l’émission
imaginaire. On pense bien que la poésie les calmera et les emportera loin de
l’affreuse réalité. Voilà ce qu’ils pensent et ce qu’exploite une multitude de magazines dont la moindre réclame
entrouvre les portes du rêve.
Le poète était seul au milieu d’un monde industriel. Le voilà seul au
milieu d’un monde poétique. Grâce à ce monde, généreusement équipé pour
l’évasion comme pour les sports d’hiver, par le théâtre, le cinématographe et
les magazines de luxe, le poète reconquiert enfin son invisibilité.
DES MOTS
Je n’attache aucune
importance à ce que les gens appellent le style et à quoi ils se flattent de
reconnaître un auteur. Je veux qu’on me reconnaisse à mes idées, ou mieux, à ma
démarche. Je ne cherche qu’à me faire entendre le plus brièvement possible.
J’ai remarqué, lorsqu’une histoire n’accroche pas l’esprit, qu’il avait
tendance à lire trop vite, à savonner sa pente. C’est pourquoi, dans ce livre,
je contourne mon écriture, ce qui oblige à ne pas glisser en ligne droite, à
s’y reprendre à deux fois, à relire les phrases pour ne pas perdre le fil.
Lorsque je lis un livre,
je m’émerveille du nombre de mots que j’y rencontre et je rêve de les employer.
Je les note. Au travail cela m’est impossible. Je me limite à mon vocabulaire.
Je n’arrive pas à en sortir, et il est si court que le travail devient un
casse-tête.
Je me demande, à chaque ligne, si j’irai plus loin, si la combinaison de
ces quelques mots que j’emploie, toujours les mêmes, ne finira pas par se
bloquer et par me contraindre à me taire. Ce serait bénéfice pour tout le
monde, mais il en va des mots comme des chiffres ou des lettres de l’alphabet.
Ils savent se réorganiser différemment et perpétuellement au fond du
kaléidoscope.
J’ai dit que je jalouse
les mots des autres. C’est qu’ils ne sont pas les miens. Chaque auteur en
possède un sac de loto avec lequel il faudra qu’il gagne. Sauf en ce qui
concerne le style que je réprouve, dont celui de Flaubert est le type — trop
riche en vocables — le style que j’aime, ceux de Montaigne, de Racine, de
Chateaubriand, de Stendhal, n’en fait pas grande dépense. On aurait vite fait
de les y compter.
Voilà le premier point
sur lequel un professeur devrait, en classe, attirer l’attention de ses élèves,
au lieu de leur vanter les belles périodes. Ils apprendraient vite combien la
richesse réside en une certaine pénurie, que Salammbô est un
bric-à-brac, le Rouge et le Noir un trésor.
Les mots riches de
couleur et de sonorité sont aussi difficiles d’emploi que les bijoux voyants et
que les teintes vives dans la toilette. Jamais une élégante ne s’en affuble.
Je m’étonne de ces lexiques où les notes en bas de page, qui prétendent
éclaircir un texte, le dépointent et le repassent à plat. C’est ce qui arrive
avec Montaigne qui ne cherche rien d’autre sinon de dire ce qu’il veut dire et
y parvient coûte que coûte mais en tordant la phrase à sa façon. A cette façon
de tordre la phrase les lexiques préfèrent le vide, s’il se développe bien.
Cela n’incrimine pas l’emploi exceptionnel d’un mot rare, pourvu qu’il arrive à
sa place et rehausse l’économie du reste. Je conseille cependant de l’admettre
s’il ne jette pas trop de feux.
Les mots ne doivent pas
couler : ils s’encastrent. C’est d’une rocaille où l’air circule librement
qu'ils tirent leur verve. Ils exigent le et qui les cimente, sans
oublier les qui, que, quoi, dont. La prose n’est pas une danse.
Elle marche. C’est à cette marche ou démarche qu’on reconnaît sa race, cet
équilibre propre à l’indigène dont la tête porte des fardeaux.
Cela me fait penser que
la prose élégante est en fonction du fardeau que l’écrivain transporte dans sa
tête et que toute autre résulte d'une chorégraphie.
Il m’est arrivé, jadis,
de vouloir faire partager le goût que j’avais d’une prose à des personnes qui
s’y prétendaient insensibles. Lue à haute voix, avec la crainte de ne pas
convaincre, cette prose exhibait ses vices.
Ce genre d'échecs m’a
mis sur mes gardes. Je me méfiai de ce qui me séduisait au premier abord. Peu à
peu, je m’accoutumai à ne m'éprendre que d’écrivains chez lesquels la beauté
séjourne sans qu’ils s’en aperçoivent et qui ne s’en préoccupent pas.
Bien que les mots d’un
vocabulaire ne correspondent point au nôtre, il m’arrive de rencontrer une
expression professionnelle et de l’adopter. J'en citerai une, qui se trouve
dans les livres de bord : A mon . Elle dit parfaitement ce qu’elle veut
dire et je l’adopte, faute d’en connaître une qui me convienne mieux.
La langue française est difficile. Elle répugne à certaines douceurs. C'est
ce que Gide exprime à merveille en disant qu’elle est un piano sans pédales. On
ne peut en noyer les accords. Elle fonctionne à sec. Sa musique s'adresse plus
à l’âme qu’à l’oreille.
Ce que vous estimez
musical chez les classiques n’est souvent qu’un ornement de l’époque. Les
grands n’y échappent pas, bien qu’ils le surmontent. On en constate l’artifice
chez les petits. Célimène et Alceste nous paraissent parler la même langue.
Il est probable que les
langues les plus disparates que nous écrivons à notre époque se confondent dans
une autre. Le style en deviendra presque analogue. Il n’en surgira plus que la
différence de ce qu’elles expriment et que leur exactitude à l'exprimer.
Outre que les mots
signifient, ils jouissent d’une vertu magique, d’un pouvoir de charme,
d’une faculté d’hypnose, d'un fluide qui opère en dehors du sens qu’ils possèdent.
Mais il n’opère que lorsqu’on les groupe et cesse d’opérer si le groupe qu’ils
forment n’est que verbal. L’acte d’écrire se trouve donc lié à plusieurs
contraintes : intriguer, exprimer, envoûter. Envoûtement que nul ne nous
enseigne, puisqu’il est le nôtre et qu’il importe que la chaîne des mots nous
ressemble pour être en mesure d’agir. Ils nous remplacent, en somme, et doivent
suppléer à l’absence de nos regards, de nos gestes, de notre démarche. Us ne
peuvent donc agir que sur les personnes perméables à ces choses. Pour les
autres, c’est lettre morte et elles leur resteront lettre morte, loin de nous
et après notre mort.
La puissance magique de
ces mots groupés ensemble fait que je ne puis converser avec un écrivain de
n’importe quelle époque. Car ils me mettent en sa présence.
Je l'interroge. Leur armature interne me laisse entendre ce qu’il m’aurait
répondu. A moins que je ne trouve la réponse toute écrite, ce qui m’arrive.
Mon livre n’a d’autre
projet que d’engager une conversation avec ceux qui le lisent. Il est à
l’inverse d’un cours. Je devine qu’il enseignerait peu de choses à qui me
frequente. Il ne souhaite que rencontrer des inconnus qui m’eussent aimé
connaître et discuter avec moi de ces énigmes dont l’Europe se désintéresse et
qui deviendront le murmure de quelques rares mandarins chinois.
Le groupement des mots
est à tel point efficace que les philosophes, dont le système du monde est
chassé par un autre (et ainsi de suite) ne s’implantent pas dans les mémoires
par ce qu’ils ont dit, mais par leur manière de le dire. Quel est celui d’entre
eux qui n'emprunte pas sa fortune à l’écriture ou du moins à l’éclairage particulier
qu’il projette sur une erreur? Nous savons maintenant que Descartes se trompe
et nous le lisons tout de même. C’est donc le verbe qui dure, par une présence
qu’il renferme, par une chair qu’il perpétue.
Qu’on m’entende bien. Je
ne parle pas du verbe dont s'orne une pensée. Je parle d’une architecture de
mots si singulière, si robuste, si parfaitement conforme à l'architecte.
qu'elle conserve son efficace à travers une traduction.
C’est le phénomène de Pouchkine qu’il ne se puisse communiquer en aucune
autre langue que la sienne. Son charme s’exerce sur les Russes, de
quelque bord qu’ils soient. Un tel culte ne peut s’appuyer seulement sur une
musique, et puisque le sens nous en arrive fade, il faut donc qu’il s’y mêle
quelque sorcellerie. Je la mets sur le compte d’une goutte de sang noir qu’il
avait dans les veines. Le tambour de Pouchkine parle. Qu’on en change la
frappe, il ne reste que du tambour.
Certes, chez les poètes,
le rôle des mots est plus vif que dans la prose. Mais j’estime qu’il en passe
quelque dessein d’une langue dans l’autre si le nœud des mots est assez fort.
Shakespeare le prouve. Voilà pourquoi le cas Pouchkine m’apparaît unique. Vingt
fois je me le suis fait traduire. Vingt fois le Russe qui s’y employait lâchait
prise, me disant que le mot viande, employé par Pouchkine, ne signifiait
plus viande, mais en mettait le goût dans la bouche et que cela n’appartenait
qu’à lui. Or, le mot viande n’est que le mot viande. Il ne peut
se dépasser que par les mots qui l’environnent et lui communiquent cet étrange
relief.
La vanité nous conseille
d’envoyer notre pollen dans les étoiles. Mais, j’y songe, le luxe d’un poète
doit être de n’appartenir qu’à ses compatriotes. Sans doute ce qui me semblait
nuire à Pouchkine, est-il, au contraire, ce qui le protège et lui vaut le culte
russe dont il est l’objet.
La prose est moins
soumise que la poésie aux recettes d’envoûtement. Il est vrai que, plus elle
s’écarte de l’anecdote, plus il devient chanceux de la changer d’idiome. A
moins que ne se produise la rencontre providentielle entre un Charles
Baudelaire et un Edgar Poe. C’est-à-dire entre deux hommes également initiés à
l’emploi des herbes, épices, drogues, doses, cuissons, mélanges et de l’effet
qu’ils provoquent dans l’organisme.
DE LA BEAUTE
La beauté est une des
ruses que la nature emploie pour attirer les êtres les uns vers les autres et
s’assurer leur appui.
Elle l’emploie dans le
plus grand désordre. Ce que l’homme appelle vice étant commun à toutes les espèces,
dont le mécanisme fonctionne à l’aveuglette. La nature arrive coûte que coûte à
ses fins.
Nous imaginons mal les
ressorts d’un tel mécanisme chez les astres, puisque la lumière qui nous les
dénonce résulte ou d’un reflet, ou, comme toute lumière, d’une décomposition.
L’homme s’imagine qu’ils lui servent de lustre, mais il ne les observe que dans
leur usure et dans leur mort.
---
La beauté, dans l’art,
est une astuce qui l’éternise. Elle voyage, elle tombe en route, elle féconde
les esprits. Les artistes lui fournissent le véhicule. Ils ne la connaissent
pas. C’est par eux et en dehors d’eux qu’elle s’acharne. Veulent-ils la capter
de force, ils n’en produisent que l’artifice.
La beauté (qui ne l’est
pas pour elle, simple servante d’un système nuptial) profite d’un peintre, par
exemple, et ne le lâche plus. Cela détermine souvent du désastre dans la
progéniture de certains créateurs qui prétendent procréer par voie chamelle et
jouer sur les deux tableaux. Qu’on n’aille pas croire que la beauté manque
d’esprit critique ni qu’elle en fasse preuve. Ce n’est ni l’un ni l’autre. Elle
se rue à la pointe, quelle qu’elle soit,
Elle rencontre toujours
ceux qui l’épousent, assurent sa continuité.
Sa foudre, tombant aux
pointes, embrase les œuvres qui scandalisent. Elle évite les représentations
ineptes de la nature.
L’habitude d’une représentation inepte de la nature est si bien ancrée chez
l’homme qu’il l’adore même chez les peintres où elle ne joue qu’un rôle de prétexte
à prendre l’élan. Lorsque cette représentation offre à l’homme, peintes avec
une lisibilité équivalente, des anecdotes du rêve ou de l’esprit, il se
révolte. L’anecdote ne le concernant plus, mais concernant un autre. Son
égoïsme l’en détourne. Il s’érige en juge. Il condamne. Le crime est d'avoir
voulu le distraire de sa propre contemplation.
De même que l'homme ne
lit pas, mais se lit, il ne regarde pas, il se regarde.
L'art existe à la minute
où l'artiste s’écarte de la nature. Ce par quoi il s’en écarte lui donne le
droit de vivre. Cela devient une vérité de La Palice.
Mais l'écart peut se
produire alors qu’il est inapparent. (Je pense à Vermeer et à certains très
jeunes modernes.) C’est le comble de l’art. La beauté s’y glisse en cachette.
Elle pose un piège parfait, d’apparence naïve comme celui des plantes. Elle y
attirera sournoisement le monde sans provoquer la crainte que sa figure de
Gorgone provoque toujours.
NOTE
Depuis que les chapitres
de ce livre ont été écrits et imprimés, le théâtre a représenté l’Aigle à deux têtes. Je
ne me trompais pas dans la préface, écrite en même temps que la pièce. J’y
menais une politique semblable à celle de la Belle et la Bête. Politique
analogue à celle d’un âge ou les politiques et les guerres ne jouaient pas, où
nos disputes d’âmes étaient la seule politique valable. (Les surréalistes et
moi par.)
Le succès de la pièce
(obtenu par les couleurs et les parfums que l’œuvre ignore et qui attirent le
public) s’oppose au tribunal d’une critique uniquement préoccupée d’art et en
proie aux habitudes.
Il faut bien comprendre que l’art, je le répète, créateur, mais qu'il n'existe que s'il prolonge un cri,
un rire ou une plaire. C'est ce qui fait que certaines toiles de musé
me signe et vivent avec angoisse, tandis que d'au sont mortes et n'exposent que
les cadavres embaumés de l’Egypte.