L'art de jouir - Julien Offray de la Mettrie
Plaisir, Maître souverain des hommes et des dieux, devant qui tout disparaît, jusqu’à la raison même, tu sais combien mon coeur t’adore, et tous les sacrifices qu’il t’a faits. J’ignore si je mériterai d’avoir part aux éloges que je te donne ; mais je me croirais indigne de toi, si je n’étais attentif à m’assurer de ta présence, et à me rendre compte à moi-même de tous tes bienfaits.
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Ne craignez ni l’amour, ni l’amant ; une fois maîtresse de mon coeur, vous le serez toujours. La vertu conserve aisément les conquêtes de la beauté.
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J’aime, comme on aimait avant qu’on eût appris à soupirer, avant qu’on eût fait un art de jurer la fidélité. Amour est pauvre : je n’ai qu’un coeur à vous offrir, mais il est tendre comme le vôtre. Unissons-les, et nous connaîtrons à la fois le plaisir, et cette tendresse plus séduisante qui conduit à la plus pure volupté des coeurs.
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Rien ne fatigue, rien ne coûte quand on aime : la distance des lieux est bientôt franchie par les ailes de l’Amour.
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« Ton plaisir, dit Isménias, n’est que l’ombre de ceux que peuvent goûter deux coeurs parfaitement unis. »
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Les amants en reviennent toujours là : ont-ils tort ? C’est le but de l’amour ; il ne bat que d’une aile lorsqu’il est seul ; en compagnie il n’en a point ; tête à tête il en a mille.
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Si la joie est commune, la tristesse l’est aussi ; les larmes de la douleur sont confondues avec celles du plaisir, qui en est plus tendre.
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oubliez-vous, pour ne vous occuper que du bonheur de votre amant.
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l’amour ne perd rien à tous les serments qu’il fait faire ; jurez à votre maîtresse que vous lui serez fidèle, et levez-vous. C’est ici qu’il faut s’arracher au plaisir que les regrets accompagnent. N’attendez pas les pleurs ni les plaintes d’une belle qui touche au moment de vous perdre
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Les plaisirs forcés sont-ils des plaisirs ?
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Si les plaisirs du corps sont si vifs, quels sont ceux de l’âme ! Je parle de cette tendresse pure, de ces goûts exquis qui semblent faire distiller la volupté goutte à goutte au fond de nos âmes, tellement enivrées, tellement remplies de la perfection de leur état qu’elles se suffisent à elles-mêmes et ne désirent rien.
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je voudrais que toute mon âme pût passer dans la tienne.
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Si rien ne doit jamais dégoûter un amant de l’objet qu’il aime, si rien ne doit suspendre un service dont l’amour permet la célébration, rien aussi ne doit rendre infracteur de la foi qu’on a jurée à sa maîtresse.
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Aimer, être aimé, c’était pour son coeur délicat la première jouissance, jouissance sans laquelle toutes les autres n’étaient rien. La vérité des sentiments était l’âme de leur tendresse, et la tendresse l’âme de leurs plaisirs ; ils ne connaissaient d’autres excès que celui de plaire et d’aimer : c’est la volupté des coeurs.
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l’esprit a sa mousse comme le champagne),
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Ne perdons point le temps en regrets frivoles ; et tandis que la main du printemps nous caresse encore, ne songeons point qu’elle va se retirer ; jouissons du peu de moments qui nous restent ; buvons, chantons, aimons qui nous aime ; que les jeux et les ris suivent nos pas ; que toutes les voluptés viennent tour à tour, tantôt amuser, tantôt enchanter nos âmes ; et quelque courte que soit la vie, nous aurons vécu.
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Le voluptueux aime la vie, parce qu’il a le corps sain, l’esprit libre
et sans préjugés. Amant de la Nature, il en adore les beautés, parce qu’il en
connaît le prix ; inaccessible au dégoût, il ne comprend pas comment ce poison
mortel vient infecter nos coeurs.
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