Au jardin de l'infante - Albert Samain
Vague et noyée au fond du brouillard hiémal,
Mon âme est un manoir dont les vitres sont closes.
Mon âme est un manoir dont les vitres sont closes.
Ce soir, l’ennui visqueux suinte au long des choses,
Et je titube au mur obscur de l’animal.
Ma pensée ivre, avec ses contours obsédants,
S’affole et tombe ainsi qu’une danseuse soûle ;
Et je sens plus amer, à regarder la foule,
Le dégoût d’exister qui me remonte aux dents.
Et je sens plus amer, à regarder la foule,
Le dégoût d’exister qui me remonte aux dents.
Un lugubre hibou tournoie en mon front vide ;
Mon cœur sous les rameaux d’un silence torpide
S’endort comme un marais violâtre et fiévreux.
Et toujours, à travers mes yeux, vitres bizarres,
Je vois — vers l’Orient étouffant et cuivreux —
Des cités d’or nager dans des couchants barbares.
II est d’étranges soirs, où les fleurs ont une âme,
Où dans l’air énervé flotte du repentir,
Où sur la vague lente et lourde d’un soupir
Où dans l’air énervé flotte du repentir,
Où sur la vague lente et lourde d’un soupir
Le cœur le plus secret aux lèvres vient mourir.
Il est d’étranges soirs, où les fleurs ont une âme,
Et, ces soirs-là, je vais tendre comme une femme.
Il est de clairs matins, de roses se coiffant,
Où l’âme a des gaîtés d’eaux vives dans les roches,
Il est d’étranges soirs, où les fleurs ont une âme,
Et, ces soirs-là, je vais tendre comme une femme.
Il est de clairs matins, de roses se coiffant,
Où l’âme a des gaîtés d’eaux vives dans les roches,
Où le cœur est un ciel de Pâques plein de cloches,
Où la chair est sans taché et l’esprit sans reproches.
Il est de clairs matins, de roses se coiffant,
Ces matins-là, je vais joyeux comme un enfant.
Ces matins-là, je vais joyeux comme un enfant.
Il est de mornes jours, où las de se connaître
Le cœur, vieux de mille ans, s’assied sur son butin,
Où le plus cher passé semble un décor déteint
Où s’agite un minable et vague cabotin.
Il est de mornes jours, las du poids de connaître,
Et, ces jours-là, je vais courbé comme un ancêtre.
Il est des nuits de doute, où l’angoisse vous tord,
Où l’âme, au bout de la spirale descendue,
Pâle et sur l’infini terrible suspendue.
Sent le vent de l’abîme, et recule éperdue !
Il est des nuits de doute, où l’angoisse vous tord,
Et, ces nuits-là, je suis dans l’ombre comme un mort.
Il est de mornes jours, las du poids de connaître,
Et, ces jours-là, je vais courbé comme un ancêtre.
Il est des nuits de doute, où l’angoisse vous tord,
Où l’âme, au bout de la spirale descendue,
Pâle et sur l’infini terrible suspendue.
Sent le vent de l’abîme, et recule éperdue !
Il est des nuits de doute, où l’angoisse vous tord,
Et, ces nuits-là, je suis dans l’ombre comme un mort.
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