La montagne de l'âme - Gao Xingjian
Le langage est comme une boule de pâte dans laquelle passent des phrases. Dès que tu abandonnes les phrases, c’est comme si tu pénétrais dans un bourbier dont tu ne peux plus ressortir.
Dans les ennuis, les tracas, l’homme est seul. Une fois que tu es dedans, tu dois t’en sortir par toi-même, pas de sauveur pour s’occuper de ces vétilles.
Tu rampes dans le langage en traînant tes pensées pesantes. Tu voudrais tirer un fil conducteur pour t’aider à en sortir, mais plus tu rampes plus tu es harassé, tu es ligoté par le fil conducteur du langage ; tel un ver à soie qui tisse son fil, tu fabriques un filet autour de toi, qui t’enserre dans des ténèbres de plus en plus profondes. La faible lumière au fond de ton cœur est de plus en plus ténue et, tout au bout du filet, ce n’est que le chaos.
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Quand les images sont perdues, l'espace aussi. Quand le son est perdu, le langage aussi
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Comment trouver enfin un langage pur et limpide, musical, insécable,
plus élevé que la mélodie, au-delà des limites fixées par la morphologie
et la syntaxe, sans distinction entre l’objet et le sujet, qui dépasse
les personnes, se débarrasse de la logique, en constant développement,
qui n’ait recours ni aux images, ni aux métaphores ni aux associations
d’idées ou aux symboles?