mercredi 12 novembre 2025

Oeuvres - Holderlin

Oeuvres - Holderlin

FRAGMENT THALIA

Je crus vraiment succomber. Que la vie perde ainsi tout sens, c’est une souffrance sans égale, un sentiment continuel d’anéantissement. Un découragement incompréhensible m’écrasait. Je n’osais plus lever les yeux sur les autres. 

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HYPÉRION ou L’ERMITE DE GRÈCE 

« Comment se fait-il que l’homme ait de si grands désirs? me demandais-je souvent. Que vient faire l’infini dans son cœur ? L’infini ? Oh se situe-t-il ? Qui l’a perçu? L’homme veut plus qu’il ne peut : cela, oui, pourrait bien être vrai. Tu en as fait assez souvent l’expérience. Mais cet état de choses eSt nécessaire. L’homme doit le doux, l’exaltant sentiment de sa force au seul fait que celle-ci ne s’écoule pas à son gré; il doit tous ses beaux rêves d’immortalité, tous les fantômes immenses et charmants qui le ravissent, son Élysée et ses dieux, au seul fait que la ligne de sa vie n’eSt pas droite, qu’il ne vole pas comme la flèche et qu’une puissance autre barre la route à celui qui fuit. »

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Paix de la beauté, paix divine! Celui qui apaisa un jour en toi le tumulte de la vie et les doutes de l’esprit, quel autre recours lui restera ?    

Je ne puis parler d’elle; mais il eSt des heures où la perfection du Bien et du Beau apparaît comme entre des nuages, où le ciel de l'accomplissement s’ouvre devant l’intuition de l’amour : alors, Bellarmin, songe à cet être, ploie avec moi le genou et imagine ma félicité! Mais n’oublie pas que ce que tu devines, je l’avais, que ce qui t’apparaît voilé, je le voyais de mes yeux!

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Que pèse tout le savoir acquis du monde, que pèse la fière maturité des pensées humaines, en face des accents spontanés de cet esprit qui ne savait ni ce qu’il savait, ni ce qu’il était ?.

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Là, Diotima et moi, nous volions, telles les hirondelles d’un printemps à l’autre du monde, à travers le vaSte domaine du soleil et au-delà, vers les autres îles du ciel, le long des rivages dorés de Sirius, dans les vallées peuplées d’esprits du Bouvier...

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» L’art eSt le premier enfant de la beauté humaine, de la beauté divine. En lui, l’homme divin rajeunit et recommence. Pour prendre conscience de soi, il s’oppose sa propre beauté. Ainsi se donna-t-il ses dieux. Au début, en effet, quand régnait la Beauté éternelle, à soi-même inconnue, l’homme et ses dieux ne faisaient qu’un. J’évoque des mystères, mais réels.

» L’art eSt le premier enfant de la beauté divine. Ainsi en fut-il chez les Athéniens.

» Le second enfant de la beauté est la religion. La religion est l’amour de la beauté. Le sage aime la beauté elle-même, la beauté infinie en quoi tout eSt contenu; le peuple aime ses enfants, les dieux, qui lui apparaissent sous des espèces diverses. Il en fut également ainsi chez les Athéniens. Sans cet amour de la beauté, sans cette religion, l’État n’eSt qu’un squelette privé d’âme et de vie; la 

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— Je ne m’en suis pas éloigné, dis-je. Seul un Grec ; pouvait inventer la grande parole d’Héraclite, — l’Un distinct en soi-même —, car elle dit l’essence de la beauté, et avant qu’elle fût inventée, il n’y avait pas de philosophie.

» Le tout était là, on pouvait dès lors définir. La fleur s’était épanouie : on pouvait analyser.

» La beauté était advenue parmi les hommes, elle se manifestait dans la vie comme dans l’esprit, elle était  l’entente infinie.

» On pouvait la décomposer, la dissocier en esprit, recomposer en pensée l’objet de cette dissociation; ainsi allait-on acquérir une connaissance de plus en plus précise de l’essence du Plus haut et du Meilleur, et l’ériger ensuite en loi dans les multiples domaines de l’esprit.

» Comprenez-vous maintenant pourquoi les Athéniens, plus que quiconque, devaient être aussi un peuple philosophe ?

» L’Égyptien ne le pouvait pas. Qui n’aime pas le ciel et la terre et qui n’est aimé d’eux, qui ignore l’accord avec l’élément dans lequel il vit, accord dispensé par ce mutuel amour, ne peut être, par nature, en accord avec

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» Or, l’intellect pur n’a jamais rien produit d’intelligent, ni la raison pure rien de raisonnable.

» Sans la beauté de l’esprit, l’intellect est pareil au serf qui taille dans un bois grossier, comme on le lui a prescrit, les pieux d’un enclos et qui les cloue ensemble, pour le jardin de son maître. Toute l’activité de l’intellect est de l’ordre du nécessaire. En assurant l’ordre, il nous prémunit contre le non-sens et l’injuste; mais être à l’abri du non-sens et de l’injuste n’est pas le suprême degré, pour l’homme, de l’excellence.

» Sans la beauté de l’esprit et du cœur, la raison est comme un contremaître que le propriétaire de la maison a imposé aux domestiques : il ne sait pas mieux qu’eux ce qui doit résulter de leur interminable travail, et se contente de crier qu’on se dépêche; encore eSt-ce tout juste s’il ne regrette pas que le travail avance : celui-ci terminé, il n’aurait plus d'ordres à donner, et son rôle serait joué.

» L’intellect pur ne produit nulle philosophie, car la philosophie ne se réduit pas à la reconnaissance bornée de ce qui eSt.

» La raison pure ne produit nulle philosophie, car la philosophie ne se réduit pas à l’aveugle exigence d’un progrès sans fin dans la synthèse et l’analyse de chaque substance possible.

» En revanche, qu’apparaisse à la raison ambitieuse l’idéal de la beauté, le aivin ev hiamépov eatmû, la voilà qui cesse d’exiger aveuglément : elle sait pourquoi et en vue de quoi elle le fait.

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ETRE ET JUGEMENT

Mais cet Être, il ne faut pas le confondre avec l’identité. Quand je dis : je suis je, le sujet (je) et l’objet (je) ne sont pas unis de telle manière que l’on ne puisse procéder à aucune séparation sans altérer la nature de ce qui doit être séparé; au contraire, le moi n’eSt possible que grâce à la séparation du je et du moi. Comment pourrais-je dire : Moi! sans conscience du Moi? Mais comment la conscience de soi est-elle possible? 

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LETTRE 83 A NEUFFER

Le langage eSt un organe de notre cerveau, de notre cœur, l’indice de notre imagination, de nos idées, c’eSt à nous qu’il doit obéir.

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FONDEMENTS D'EMPEDOCLE

Dans la vie pure la nature et l’art s'opposent seulement harmoniquement. L’art est la floraison, la perfection de la nature. La nature ne devient divine que par sa fusion avec l’art, différente d’espèce, mais harmonique. Lorsque chacun des deux eSt entièrement ce qu’il peut être et que l’un s’unit à l’autre en comblant la lacune de l’autre, lacune inévitable, sinon il né serait pas tout à fait ce qu’il peut être en tant qu’objet singulier, alors nous sommes en présence de la perfection, et le divin se trouve à mi-chemin entre les deux, L’homme, organique, artistique, eSt la fleur de la nature; la nature, plus aorgique, lorsqu’elle est ressentie dans sa pureté par l’homme organisé et formé comme tel d’une manière pure, lui donne le sentiment de la perfection. Toutefois, cette vie n’existe que dans le sentiment, elle n’exiSte pas pour la connaissance.  

 

 


 


 

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