Le voyageur chérubinique - Angelus Silesius
5. On ne sait pas ce que l’on est
Je ne sais pas ce que je suis, je ne suis pas ce que je sais :
Une chose, et pourtant aucune chose, un petit point et un cercle.
43. On aime aussi sans connaître
Je n’aime qu’une chose et ne sais ce qu’elle est,
Et parce que je l’ignore je l’ai choisie.
274. En finir avec le hasard
Il faut en finir avec le hasard et toute apparence mensongère :
Tu dois être essentiel et sans fard.
14 .La pauvreté mystique
L’âme qui ne sait rien, ne veut rien, n’aime rien qu’une seule chose
Doit aujourd’hui même être l’épouse de l’époux éternel.
209. Le vrai vide
Le vrai vide est comme un vase splendide
Qui porte du nectar : il a, et ne sait quoi.
89. La beauté
J’aime beaucoup la beauté ; mais j’hésite à l’appeler belle
Si je ne la vois pas toujours au milieu des épines.
78. L’espoir fait vivre l’épouse
L’espoir me tient en vie ; sinon, depuis longtemps, c’en serait fait de moi ;
Pourquoi ? — parce que je ne suis pas auprès de mon époux.
162. L’un en l’autre
L’œuf est dans la poule et la poule est dans l’œuf :
Le deux est en un et l’un dans le deux.
23. Le temps ne passe pas vite
On dit que le temps passe vite : qui a vu son vol ?
J’affirme qu’il reste immobile dans la notion du monde.
27. Le carrefour de l'éternité
Tu es au carrefour : où te dirigeras-tu ?
A gauche c'est ta perte, à droite le gain.
129. U intérieur n’a pas besoin de l’extérieur
Celui qui a ramené ses sens vers l’intérieur
Il entend ce qu’on ne dit pas et il voit dans la
nuit.
302. La chose la plus rapide
L’amour est la chose la plus rapide ; il peut, par lui seul,
Etre au plus haut ciel en un seul instant.
APPENDICE DE DIX SONNETS
III
L' âme tombée
J’étais une image angélique et désormais je suis pareil aux bêtes ;
J’étais au paradis, ne connaissant que joies ;
A présent je suis sur la terre, et ne connais que la peine et l’angoisse ;
La colère de l’enfer ne pouvait me toucher, Maintenant, s’il fait chaud, je fonds presque, et je me glace dans le froid,
Et j’éprouve mille maux. J’étais un maître du temps
Et c’est lui qui me domine. J’étais mon propre habit
Et dans le dénûmant je porte désormais des plumes étrangères.
Dieu avait un regard ami, m’appelait cher enfant,
À présent Sa colère me fait peur et le péché me repousse loin de Lui.
Une crainte constante est en moi et m’entoure ; J’ai vu de mes yeux mon propre malheur ;
Le diable et la mort en veulent à ma vie.
Pauvre âme ! Qu’ai-je fait ?
258. Comment l'on devient sage
Homme, si tu veux devenir sage, si tu veux
connaître Dieu et te connaître toi-même,
Il te faut d’abord détruire par le feu le désir du monde en toi.
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